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25 janvier 2022

Comment le droit de la propriété intellectuelle contribue a soutenir le développement du design écoresponsable

Le Green Deal européen et le design écoresponsable dans le domaine textile

Le design peut être défini comme une activité liée à une pensée complexe, où la recherche esthétique épouse une stratégie d’entreprise. Porteur de valeurs symboliques, il est étroitement lié à l’image d’un produit, qui devient attractif pour les consommateurs en raison de son aspect esthétique et de sa compétitivité sur le marché.

Les émotions sont au centre des créations de design, notamment procurées par les sensations liées à la vue et au toucher. Or, dans un univers toujours plus écoresponsable et sensible aux attentes des consommateurs, et très vigilant au respect de l’environnement, les objets de design ne doivent pas seulement s’arrêter à l’apparence de la forme esthétique d’un produit, mais aussi communiquer un message d’écoresponsabilité.
Par conséquent, les produits de design peuvent véhiculer des symboles, pour des consommateurs de plus en plus conscients du développement durable et de l’importance de préserver l’environnement, dans le respect des directives du "Green Deal européen", dans le cadre du Plan européen "Next Generation EU".

C’est notamment pour faciliter et favoriser la transition économique vers le "green", avec la recommandation de réduire les émissions carbone que l’on doit exploiter au mieux les ressources disponibles, pour renforcer le développement durable. 

Dans le domaine textile, cela se traduit par le choix de fibres à faible impact environnemental et écoresponsables, comprenant également des matériaux biodégradables en mesure d’influencer de manière positive les tendances consommateurs.

En Italie, le plan de transition écologique est encadré par les lignes d’intervention stratégique de la propriété intellectuelle, tracées par le décret législatif du 19/06/2021, n° 119, entré en vigueur au mois de septembre 2021, en conformité au "Green Deal européen". Ce décret met l’accent sur l’innovation écoresponsable et, en particulier, sur le développement de ce type de design dans le domaine textile.

Selon les lignes directrices de l’Union européenne, qui visent à moderniser et à harmoniser encore plus la législation sur les dessins & modèles, pour la rendre plus accessible et pour faciliter la transition vers l’économie numérique et "verte", les nouvelles technologies sont encouragées dans le domaine des dessins-modèles, poussant de cette manière l’innovation et la soutenant également au niveau économique.

Dans ce cadre, en particulier, la Commission de l’Union européenne s’interroge sur la possibilité de protéger, au titre de dessin-modèle, les impressions 3D et les technologies utilisées pour les impressions 3D, à l’exclusion de l’utilisation privée de ce type de technologie. L’impression 3D concerne de très près l’industrie textile et peut constituer un développement important pour ce secteur. En effet, la protection envisagée au titre de dessin-modèle d’impression 3D,  également pour les créations numériques, pourrait beaucoup changer le scénario, grâce à l’utilisation de nouvelles technologies et de nouveaux matériaux, qui peuvent faire l’objet d’une protection, soit au titre de brevet, soit de dessin-modèle, lorsque l’impression 3D vient à jouer un rôle décoratif et structurel et donc, devient elle-même un ornement du produit, pouvant ainsi jouir d’une pleine projection, à titre de dessin-modèle.

En outre, l’utilisation de machines spéciales pour imprimer directement sur les tissus peut donner lieu à de nouveaux articles d’habillement, confortables et qui présentent un design particulier.

Selon ce qui a été annoncé par le "World Intellectual Property Day" en 2020, le droit de dessin-modèle est vraiment le titre de propriété intellectuelle qui constitue une innovation essentielle, pouvant jouer un rôle fondamental dans l’économie verte (green economy). Par conséquent, les dessins-modèles enregistrés, mais également ceux non-enregistrés vont augmenter de manière remarquable et créer une nouvelle conscience chez le consommateur, au niveau de l’appréciation de leur caractère propre ou individuel et dans l'évaluation de leur imitation, ou de la contrefaçon, par l’utilisateur averti, sensible aux tendances du design dans le secteur de référence en mesure d’en apprécier les particularités et le caractère propre.

La propriété intellectuelle devient ainsi un pivot primordial pour protéger ces nouveaux dessins-modèles, qui seront enregistrés, ou vont bénéficier du statut du dessin-modèle non-enregistré, pouvant couvrir, par exemple, l’utilisation des impressions 3D les plus courantes et moins susceptibles de durer sur une longue période et qui suivront plutôt les modes du moment.

Notamment, la flexibilité du dessin & modèle permet d’assurer aux innovateurs une protection plus complète des produits, qui vont satisfaire les objectifs de l’économie verte, préservant en même temps l’environnement. Cela peut devenir une condition supplémentaire pour la protection des dessins-modèles, ou bien, pour renforcer la protection déjà existante.

Toutes ces considérations s’inscrivent bien dans le cadre des travaux relatifs à la révision du Règlement des dessins-modèles au niveau européen, où la Commission s’interroge sur l’opportunité d’imposer aux Etats-membres un examen des conditions de fond de validité de ces titres.

Concernant la condition de nouveauté du titre de dessin-modèle, il faut souligner qu’elle est appréciée avec un jugement objectif au niveau communautaire, national, en Italie, en France, au Royaume-Uni, selon l’évaluation de la nouveauté intrinsèque, tenant compte de la différence du dessin-modèle, par rapport aux formes connues sur le marché dans le secteur d’intérêt.  Dans un dessin-modèle écoresponsable, il est à souligner que les conditions de l’apparence et de la visibilité vont aussi jouer un rôle significatif. 

Avec le "green deal"  2020, la Commission européenne a publié le nouveau plan d’action pour l’économie circulaire, qui souligne l’importance de l’écodesign et des projets écoresponsables, se traduisant par une responsabilité majeure pour les consommateurs ; cela s’inscrit dans le programme plus général du plan "Next Generation EU", auquel l’Italie va adhérer, visant notamment à développer l’innovation et la compétitivité, respectant l’environnement, dans une optique durable, avec la possibilité de bénéficier des financements européens pour les entreprises et les designers, qui vont aller dans cette direction.

Le secteur du textile et de la mode, en général, pourront développer de manière substantielle les nouvelles technologies, réalisant des produits de design écoresponsable, susceptibles de satisfaire les besoins du public, au sein du plan européen "EU Strategy for Sustainable Textiles", visant à renforcer la compétitivité industrielle et l’innovation, établissant ainsi le marché de l’Union européen pour les produits textiles écoresponsables et circulaires, aussi à travers l’extension d’un niveaux élevé dans le recyclage de déchets, découlant de l’industrie textile, avec une attention particulière dans l’approvisionnement, la fourniture et la fabrication de produits à bas impact sur l’environnement, visés  à l’écodurabilité.

Ce défi a bien été pris en compte par les entrepreneurs du domaine textile, qui proposent de plus en plus de lignes de produits écodurables et d’articles composés de  fibres textiles "eco-friendly" et donc en ligne avec les objectifs d’économie circulaire ; voilà donc que, dans une entreprise textile, l’écodurabilité offre une valeur fondamentale, aussi en termes d’avantage compétitif, générant une épargne importante sur le plan énergétique et hydrique, ainsi qu’une réduction substantielle des déchets et de toute forme de gaspillage.

Dans ce cadre, le rôle du designer sera fondamental, parce qu’il devra à la fois créer des produits à la mode, qui vont naitre de l’utilisation de fibres textiles naturelles, écoresponsables, recyclées et réduisant au maximum l’utilisation de composants chimiques dangereux pour l’environnement et pour la santé publique, tout en créant des formes de production en mesure d’exploiter des source d’énergie alternatives.

Le designer devra alors relever ce défi, cherchant à combiner l’utilisation de nouvelles fibres textiles et de nouveaux tissus, pour inventer un textile innovant et susceptible d’être apprécié par le public.

C’est donc avec cette approche que les entreprises essayent d’exploiter au mieux la transition vers l’économie verte, développant des dessins-modèles dotés d’un caractère propre et écoresponsable qui seront appréciés par un utilisateur averti, plus sensible que la norme. En effet, à la lumière de la jurisprudence du Tribunal de l’Union européenne et de la Cour de Justice, l’utilisateur averti est celui qui est doué d’une compréhension particulière et qui, connaissant le secteur de référence, est en mesure d’apprécier le design, selon l’impression générale différente, qu’un dessin-modèle peut représenter, par rapport aux dessins-modèles précédents (pour tous, en la matière, voir par exemple, Tribunal de l’Union Européenne 24.9.20.19, Cour de Justice 18.10.2018, dans la procédure C-101/11, Balenciaga Group ./. UAMI ; Cour de Justice, 20.10.2011, C-281/10 ; Graphic PepsiCo Inc. ./. Groupe Promer Mon).

En particulier, selon les critères de jurisprudence nationale et européenne, l’utilisateur averti est capable de percevoir les différences mêmes minimes, normalement non reconnaissables par un consommateur moyen (voir, à ce propos, par exemple, Tribunal Milan 18.7.2016). 

Comment vont évaluer les conditions de protection du design écoresponsable

L’utilisateur averti, dans sa notion classique sus-rappelée, doué d’un certain degré de connaissances des dessins-modèles dans le secteur de son intérêt, est destiné à évoluer dans sa sensibilité et dans son niveau d’attention, lorsqu’il est appelé à juger les dessins-modèles écoresponsables. Aussi, aux effets de l’appréciation du caractère propre / individuel d’un dessin-modèle dans le domaine écoresponsable, on peut envisager une marge de liberté majeure du designer créateur, par rapport à la liberté technique et créative consentie par les contraintes du secteur de référence et les particularités du modèle. 

Au final, l’impression générale provoquée sur un utilisateur averti, prenant connaissance des caractéristiques d'écodurabilité, par un dessin-modèle "vert", sera forcément différente, tenant compte de l’innovation développée.
Au-delà du caractère individuel / propre du dessin-modèle écoresponsable, destiné à être fortement influencé par ce nouveau type de design "green", la notion de nouveauté du dessin-modèle va aussi subir des modifications substantielles, surtout en ce qui concerne la "technique connue", considérée comme n’importe quelle divulgation opposable et rendue disponible au public, qui peut influencer la nouveauté du dessin-modèle, dans sa complexité.

Or, considérant que écoresponsabilité va impliquer l’exploitation et la véritable réalisation de nouvelles technologies, on peut imaginer que la nouveauté du dessin-modèle écoresponsable devrait être plus facilement établie, avec un risque mineur d’opposabilité d’antériorités et/ou d’une technique connue antérieure. 

Dans cette révolution "verte", qui va concerner les dessins-modèles, en termes de titres privilégiés, d’innovation, notamment avec le développement de l’écoresponsabilité, un rôle primordial sera également joué par le dessin-modèle non enregistré, normalement bien adapté pour tout type de produit dont le cycle de vie est plus court en raison de leur usage nécissitant un degré élevé de rechange. 

Voilà donc que ce type de design satisfait parfaitement les particularités de l’innovation écoresponsable, surtout dans le domaine textile, caractérisé par la fabrication de biens, ayant un cycle de vie limité, dans le temps, lié à la mode du moment, mais qui doivent quand-même répondre aux exigences du respect de l’environnement, avec une attention particulière au recyclage des matériaux utilisés.

Aussi le cumul de protection du dessin-modèle avec le droit d’auteur du créateur s’ouvre à des formes de protection nouvelle, grâce à l’exploitation de ressources alternatives et écoresponsables et à la conception innovatrice d’objets de design, qui soient visés à exploiter ces nouvelles technologies, s’inscrivant dans l’économie circulaire. 

La protection plus harmonisée du droit d’auteur, cumulée aux dessins-modèles est, par ailleurs, un des points fondamentaux du Projet de Révision de la législation européenne des dessins-modèles, lancée par la Commission européenne.

Aujourd’hui, en effet, il n’existe pas une définition univoque d’art appliquée aux œuvres industrielles, avec certaines législations, comme celle italienne, qui appliquent une notion plus élevée de valeur artistique, avec une réduction de la possibilité, pour les œuvres de design, de bénéficier également de la protection, à titre de droit d’auteur.

Or, c’est notamment la découverte de nouvelles technologies "vertes" et leur application "artistique"  nouvelle et plus créative, qui pourra permettre aux créateurs de bénéficier d’une double protection, à titre de dessin-modèle et de droit d’auteur, avec des opportunités plus étendues, ainsi  qu’en termes de compétitivité économique

Cette attention particulière aux matériaux, ainsi qu’au cycle de fabrication des produits de design va énormément influencer le futur, dans l’appréciation du caractère propre des dessins-modèles et de la valeur artistique des produits objets de design, en particulier dans le secteur textile, qui, à cet effet, va choisir des fibres écoresponsables pour la création d’articles de design, en ligne avec la durabilité et les exigences de bénéficier du recyclage des matières, dans la production industrielle des objets de "green design", qui pourront donc être dotés de créativité plus élevée, telle à pouvoir bénéficier également de la protection du droit d’auteur.

L’on peut alors conclure cette analyse, précisant qu’avec une nouvelle façon de penser et de créer des dessins-modèles, il est possible d’accélérer la transition vers une économie circulaire, qui peut être régénérée à travers une conception nouvelle du design au service de l’environnement, favorisant un design circulaire, qui prévoit différentes formes de recyclage, avec une amélioration dans la sélection des matériaux , la réutilisation de déchets et une facilité majeure dans le démontage des objets de design ; ce sont donc ces objectifs, qui vont porter les designers à faire un effort créatif majeur, réalisant ainsi des dessins-modèles, doués d’un caractère propre plus élevé et caractérisés par une originalité plus marquée.

Contact : Paola Gelato - Avocat au Barreau de Turin 
 


 

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